Le courrier des soldats aux champs France, Monaco, Andorre, Guerres, Marcophilie

Une

Seuls quelques spécialistes s’y intéressent. Aucun commémoratif, bien sûr, n’est venu rappeler leur existence. Pourtant, les chantiers de jeunesse occupent une place non négligeable dans l’histoire postale de la Seconde Guerre mondiale.

 Article2Cartes postales de l’époque. Au dos de la première, un texte que les nouvelles recrues n’avaient
plus qu’à signer pour annoncer à leurs proches leur arrivée au camp.

Dès l’été 1940, dès la défaite française et l’armistice de Rethondes, se créent les premiers camps destinés à accueillir les soldats démobilisés. Le gouvernement de Vichy les transforme peu après en une institution organisée à l’échelle nationale, où sont incorporées les recrues du service national obligatoire, version civile de l’ancien service militaire.

Les jeunes construisent eux-mêmes leurs camps, hors des villes. Grand air, sport, discipline, travaux d’utilité collective : la vie et l’esprit des chantiers sont le reflet de la « Révolution nationale » prônée par le maréchal Pétain, avec ses valeurs de retour à la terre, d’élévation par l’effort et de service du pays.

Une cinquantaine de « groupements », de mille cinq cents hommes environ divisés en groupes de cent cinquante sont ainsi créés sur tout le territoire.

Chaque groupement utilise un ou plusieurs cachets administratifs, portant son numéro. Aux cachets polyvalents, s’ajoutent souvent celui du vaguemestre et du commissaire chef de groupement. Les autorités – commissariats régionaux, commissariat général, écoles des chefs… – possèdent leurs propres cachets et griffes.

Au total: plus d’une centaine de marques différentes, dont la valeur, selon les spécialistes, tourne généralement autour de 150 F (pour les plus rares: 500 F).

ArticleMais les spécialistes sont rares… et les lettres encore nombreuses dans les vracs et les collections non triées.

Un camp, une devise

01-03Discipline, ordre, gaîté » lit-on sur ce cachet du camp Lyautey (1),dépendant du groupement la tour d’Auvergne (Puy-de-Dôme).

Sur l’autre pli (2) : l’emblème pré-imprimé sur enveloppe du groupement Péguy de Castillon (Ariège) avec la légende « Travail notre fortune ».

En règle générale, chaque chantier possédait ainsi sa devise, plus ou moins inspirée du « Travail, famille, patrie » du régime de Vichy. La francisque à deux fers symétriques, emblème du gouvernement de Pétain, apparaît également à plusieurs reprises sur les écussons des chantiers, tel ici (3) celui du « Pourquoi pas », sans doute dénommé ainsi en hommage à Charcot et son navire, perdus en mer d’Islande peu avant la guerre.

 

Deux timbres de franchise par mois

Les chantiers n’avaient pas droit à la franchise. Mais, comme les militaires en temps de paix, ils recevaient plusieurs timbres gratuits par mois. Deux en l’occurence, en principe surchargés FM. IIs pouvaient aussi choisir de recevoir à la place des timbres des cartes interzones.

04Le courrier n’était pas limité pour les jeunes des chantiers, qui pouvaient tout aussi bien utiliser leurs propres timbres. Ici (4),une lettre expédiée aux Etats-Unis depuis le camp n° 24 de Lodève, dans l’Hérault. Affranchissement à 12,80F, soit 30 c de plus que le port « tout avion » de l’époque. Une lettre nature, en tout cas, même si elle n’est pas exactement au tarif. Et un bel exemple d’affranchissement mixte FM/timbres ordinaires.

 Une dizaine de groupements en Afrique du nord

En Algérie, en Tunisie et au Maroc, une dizaine de groupements sont créés à partir d’octobre 1840,y compris des

groupements musulmans, à Sbeitla (Tunisie) et Miliana (Algérie).

Après le débarquement allié en Afrique du nord, les effectifs des chantiers-quinze mille hommes environ -sont transférés dans l’armée. Une partie rejoint la division Leclerc et participera plus tard à la campagne d’Italie et au débarquement en Provence.

05Ici (5):griffe linéaire et grand cachet circulaire du commissariat régional des chantiers Algérie-Tunisie-Maroc.

 Jeunesse et montagne

06Comme leur nom l’indique, ces groupements étaient spécialisés dans les activités de montagne. En 1942, ils étaient au nombre de cinq : groupement Haute-Savoie (St-Pierre de Rumilly), Savoie (Challes-les-Eaux), Dauphiné (St-Bonnet en Champsans), Vignemale (Lourdes), Comminges (Luchon), auxquels s’ajoutaient l’école des cadres (Montroc-le-Planet) et le commissariat général des groupements (Grenoble), dont on voit ici (6) l’un des cachets.

De telles marques sont moins courantes que celles des chantiers habituels, beaucoup plus nombreux.

 En Allemagne aussi

En 1943, le gouvernement français institue le service du travail obligatoire, sous la pression des Allemands qui réclament de la main-d’œuvre pour leurs usines. Les chantiers de jeunesse, fournirent une partie de ces travailleurs, les Allemands réclamant même que la totalité des effectifs soit versée au STO.

07Un mouvement apparenté aux chantiers se crée en Allemagne : le Jofta (Jeunesse ouvrière française des travailleurs en Allemagne), dont les marques postales sont généralement recherchées (7).

Paru dans Timbroscopie n° 64 – Décembre 1989

Le courrier des soldats aux champs
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