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Une

Elle collectionne les records :plus ancienne série commémorative émise aux USA et au monde (1893.), relatant la plus extraordinaire et la plus lourde de conséquences des explorations jamais réalisées, plus difficile à trouver en bon état tant neuve qu’oblitérée, plus recherchée car appartenant au pays comptant le plus grand nombre de collectionneurs, la « Colombus», comme l’appellent familièrement les philatélistes du monde entier, est aussi, et de loin, la plus onéreuse des Bandes Dessinées racontant l’histoire d’un homme mystérieux, plein de contradictions, sur la personnalité duquel on s’interroge encore et dont on ignore jusqu’aux lieu et date de naissance :Christophe Colomb.

Qu’importe si les Vikings venus d’Islande, puis du Groenland, ont découvert le continent américain quelques siècles avant lui. Pour tous, et en particulier pour nos livres d’histoire, le découvreur de l’Amérique, c’est lui : Cristobal Colomb dont , – allez savoir pourquoi ? – nous orthographions le nom Christophe Colomb.

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Le voici (1) portraituré (et sans doute imaginé) en compagnie d’Isabelle, reine d’Espagne, sans laquelle on ne parlerait sans doute pas espagnol, mais peut-être français, dans tant de pays du continent américain.

0203Sur ses études, ses intuitions, ses recherches, sur l’héritage de cartes et de notes léguées par son beau-père le navigateur Palestrello, tout comme sur ses infructueuses démarches pour obtenir des subsides officiels en Italie, en Angleterre et au Portugal, notre Bande Dessinée philatélique est muette. Pour elle, l’aventure commence en Espagne. Au monastère de La Rabida, où il fait halte. Là, il rencontre le prieur Juan Perez (2) . Il lui expose ses théories, le convainc et obtient son aide : l’ecclésiastique l’introduira auprès du confesseur de la Reine. C’est à Cordoue, en 1486, qu’il est enfin reçu par la Reine (3) . Bien qu’engagée dans une difficile guerre contre les Maures, Isabelle l’écoute. Elle est presque séduite mais, hélas ! décide de consulter un comité de savants.

04Pontifiants, imbus de ce qu’ils croient être leur science, les conseillers, membres du comité, mettent en pièces le projet de Colomb qui, on le sait, se fondait sur la rotondité de la Terre pour atteindre les Indes en passant par l’Ouest, «Comment ferez-vous pour « remonter » lorsque vous serez aux Indes ?» interrogent ironiquement les pseudo-savants. Résultat : projet rejeté et Colomb désespéré. Il quitte illico la Cour et, sur sa mule, gagne Grenade. Soudain, les messagers de la Reine le rejoignent à l’entrée de cette ville (4). Que s’est-il passé ? La marquise de Noya est intervenue en sa faveur. Louis de Santangel, garde de la Cassette royale, a offert de financer l’expédition sur ses propres deniers. Et la Reine, déjà partiellement acquise à sa cause, a donné son accord. Et, comme le Trésor est vide, Isabelle n’hésite pas.

05Elle, la Reine, gage ses bijoux (5) pour financer l’expédition. C’est Palos, port espagnol de la côte atlantique, qui est désigné pour fournir les navires.

06Une grosse et solide Caravelle de 100 tonneaux, rebaptisée la « Santa Maria » (6) sera le navire amiral. 20 m de long, 52 hommes d’équipage, pontée, deux mâts à voilures carrées et deux mâts à voiles latines, la voici sur la route des Amériques… même si le dessinateur a fait flotter le drapeau dans le sens opposé au. vent ! Elle atteindra son but mais sera abandonnée sur les récifs d’Hispaniola le 25 décembre 1492.

07La revoilà, caracolant devant la «Pinta» à voilure carrée et la « Nina » à voilure latine (7). Nous sommes à l’aube du 3 août 1492. Bientôt la terre sera hors de vue. Face à nous, le grand large, l’inconnu, les dangers réels et imaginaires et, au bout, le succès, la gloire immortelle. Mais cela, personne encore ne le sait.

08La terreur qui s’empare des hommes, la mutinerie qui gronde, la foi inébranlable de Colomb, l’aide que lui apportent les frères Pinzon, commandant la Pinta et la Nina, les caravelles encalminées alors que les vivres s’épuisent, l’oiseau qui, tel la colombe de Noë, vient à point nommé redonner l’espoir d’une terre proche, tout cela manque dans notre B.D. Par contre, le cri « terre » que vient de lancer depuis son nid de pie sur la Pinta, Rodrigo de Tricento le 12octobre 1492, après 70 jours de traversée, fait monter Colomb sur le pont (8).

09Enfin, voici l’instant tant attendu : Colomb, revêtu de ses plus beaux atours, pose le pied sur la terre des Indes (9).

En fait, l’île San Salvador ou île Watling, l’une des Bahamas. II en prend possession au nom de la Couronne de Castille tandis qu’un notaire royal authentifiera le tout, aussi bien pour préserver les intérêts de la Reine que ceux de Colomb. Car pour être découvreur, on n’en est pas moins homme d’affaires et Colomb s’est fait attribuer par acte officiel non seulement les titres de Vice-Roi des terres à découvrir et d’Amiral de la Mer Océane mais aussi un dixième des richesses présentes et à venir qu’elles généreront !

10Notons, pour la petite histoire philatélique, que Colomb, glabre lorsqu’il aperçoit la terre, est devenu barbu en une nuit… ou plutôt parce que, les deux timbres étant la reproduction d’un tableau, chaque artiste a vu le navigateur à sa manière ! Le temps de découvrir Haïti, qu’il nomme Hispaniola, où il laisse une garnison, et Cuba et, dès le 11 janvier 1493, on remet le cap vers l’Europe pour rapporter la bonne nouvelle et recevoir les honneurs (10) dûs à sa valeur. Ici, l’entrée triomphale à Barcelone.

1112Regardez-le racontant ses aventures (11), face à ses souverains dont il fait la richesse. Il leur offre en cadeaux les merveilles de ce Nouveau Monde, qu’il croit toujours être l’Asie. Parmi elles, quelques Indiens effarouchés qu’il a ramenés dans ses bagages (12). Inutile de dire qu’au vu de telles preuves de la richesse des terres découvertes, Isabelle de Castille et Ferdinand d’Aragon ne se font pas tirer l’oreille pour financer une seconde expédition. Et nous voilà partis pour de nouvelles péripéties.

13On découvre donc coup sur coup la Dominique, Porto-Rico, la Guadeloupe, Montserrat mais, peu à peu, tout tourne au vinaigre. Les contacts avec les indigènes sont inamicaux, on massacre ici ou là. A la cour, les jalousies vont bon train, une commission d’enquête est nommée. Elle conclut à la culpabilité de Colomb et, c’est enchaîné (13) que le héros est reconduit en Espagne.

Dans notre B.D., les méchants triomphent. Colomb connaîtra-­t-il le « happy end » que tout le monde souhaite ?

1415Ouf ! Isabelle a pardonné ! (14) Raison de cœur ou raison d’Etat ? On ne sait, Une chose est sûre: le voisin portugais a repris du poil de la bête. Filant droit au Sud puis piquant vers l’Est, Vasco de Gama vient de découvrir – et de doubler -le Cap de Bonne Espérance et d’ouvrir une voie maritime vers les Indes -les vraies – et les épices. L’Espagne a donc besoin que Christophe reprenne du service pour faire de nouvelles découvertes. Au cours de ce troisième voyage, il va enfin toucher le continent américain (et non plus seulement des îles) le 1er août 1498, ce qui n’empêche nullement les calomnies de reprendre de plus belle… d’autant que la Couronne s’aperçoit, mais un peu tard, qu’elle a signé un contrat par trop avantageux à son chef explorateur. Usé par sa dure vie à bord, déçu, malade, on le voit raconter ici (15) ce troisième voyage (si l’on en croit la légende du timbre), mais plus vraisemblablement la quatrième et la dernière expédition. Nous sommes en 1504, l’or a afflué dans les caisses royales, Colomb n’a plus que deux ans à vivre.

Le 20 mai 1506, s’éteindra à Séville un «vieillard» de 55 ans. Amer, épuisé, abandonné de tous, il a usé ses dernières forces à réclamer du roi Ferdinand les sommes colossales qui lui étaient dues et cela sans succès. Sa protectrice, la reine Isabelle, était morte entre-temps.

Etrange homme que cet Italien au destin exceptionnel qui connut la gloire, la déchéance, la chance miraculeuse et la plus noire des déveines, que l’on célèbre pour une découverte qui n’en était pas réellement une, vaincu par l’intrigue des médiocres mais qui semble lui-même avoir mêlé dans l’étrange cocktail de son âme les plus grandes qualités et les plus grands défauts.

16Dernier hommage de cette série philatélique exceptionnelle (16), ce 5 dollars (que je vous souhaite d’avoir dans votre collection) où l’on voit son profil tel qu’il figurait sur une pièce d’or.

Paru dans Timbroscopie n° 25 – Mai 1986

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