Les chats de Man et d’ailleurs Autres spécialités, Thématiques

Une

Les nombreuses émissions de timbres qui lui sont consacrées témoignent de la popularité du félin.

01Le chat que nous connaissons cache sous un tempérament d’animal domestique une personnalité bien particulière. Ce mammifère de la famille des félidés, genre felis, de l’ordre des carnivores (1), fut le dernier animal domestiqué après le chien, le cheval et le porc, dont les différentes capacités ont été immédiatement mises à profit par l’homme.

 Un souricier déifié

Le chat, sans utilité apparente, est longtemps délaissé. Ce n’est qu’autour du troisième millénaire avant Jésus­Christ que les Egyptiens l’apprivoisent : en effet, ils ont découvert ses qualités de souricier, dont les greniers d’Egypte ont besoin. Il se fait même une place à la cour des rois. Il est passionnément aimé et même déifié, car les Egyptiens croient que certaines divinités prennent l’apparence du chat. Jusqu’alors, les prêtres considéraient le lion comme un animal sacré ; mais le chat, moins dangereux et plus docile, prend peu à peu sa place. La consécration du chat est officielle lorsque la déesse Bastet, symbole de la fécondité et de la beauté, est représentée avec une tête de chatte. Dès lors, les lois pharaoniques protègent le chat, qui est devenu un animal sacré jusque dans les familles. On se transmet le culte de père en fils. A la mort de l’animal, on l’embaume et on le place dans des coffrets de bois sculptés. En 1890, plus de trois cent mille momies de chats sont découvertes à Tell Basta, l’ancienne capitale d’Egypte.

En Europe, les seuls souriciers sont les belettes et les moufettes. Les Grecs s’intéressent les premiers au chat, à l’occasion de leurs échanges commerciaux, car outre ses talents de souricier, l’animal est beau et propre. Six couples de chats sont ramenés secrètement en Grèce en dépit de la volonté des Egyptiens de ne pas faire de leur dieu un échange commercial. Quelques années plus tard, les Grecs sont en mesure de vendre des chats aux Romains, aux Gaulois et aux Celtes.

Le chat devient populaire en Europe au premier siècle, Pline 1’Ancien le décrit précisément dans son Histoire naturelle. Les Romains, appréciant les qualités d’indépendance du chat, en font le symbole de la liberté. L’histoire du chat est heureuse pendant des siècles : il est considéré comme un animal rare et précieux. Pourtant, le Moyen Age va le voir comme la personnification des sorcières et encourage sa destruction. Il rejoint sur le bûcher les hérétiques, les sorcières et les assassins. En 1400, l’espèce est presque éteinte. A cause du manque de chats, le bacille de la peste porté par les rats détruit le tiers de la population européenne. Les persécutions durent quelques siècles encore jusqu’à ce que Louis XIV y mette enfin un terme.

Le chat redevient un animal aimé dont les artistes s’inspirent : Paradis de Moncrif (dont l’Histoire des chats est célèbre au XVIIIe siècle), Auguste Renoir (1), Guy de Maupassant, Colette et bien d’autres ont célébré sa grâce et son caractère.

02-0708-12On distingue les chats par leur robe. Il existe des races à poil long : le persan (2), l’himalayen (3), le balinais (4), Je chat des bois norvégien (5) ; et des races à poil court : l’abyssin (6), le birman (7), le siamois (8), le mau égyptien (9) ainsi que l’européen à poil court… ou tout chat de gouttière (10). Le chat domestique descend pour la majorité du chat des anciens Egyptiens, le chat ganté (felis maniculata), mais la multitude des races résulte surtout de divers croisements et sélections comme le cornish rex, qui provient d’une mutation que les éleveurs ont stabilisée (11). Parmi tout ces chats, il existe une race singulière que l’on ne trouvait que dans une petite île de Grande-Bretagne, dans la mer d’Irlande : le manx, ou chat de l’île de Man (12 à 15). Sa particularité réside dans le fait que c’est le seul chat à ne pas posséder de queue. A sa place, on trouve un léger creux, parfois recouvert d’une touffe de poils. Cette race a été créée en Asie (sa présence est attestée par des peintures anciennes au Japon, en Chine et en Malaisie) et elle s’est diffusée grâce aux marchands phéniciens. En 1558, un galion de l’Invincible Armada espagnole portant à son bord quelques spécimens de ce chat fit naufrage près de l’île de Man. Isolée sur l’île, la race se développa naturellement. Les légendes sont nombreuses pour expliquer l’origine du manx. L’une d’elles raconte que le chat fut le dernier animal à se présenter sur l’arche de Noé et que dans sa hâte, le patriarche referma la porte sur la queue de l’animal : elle fut sectionnée. Une autre rapporte que les guerriers de l’île de Man ornaient leur casques de queues de chat : afin d’éviter la douleur d’une mutilation, une chatte attentionnée aurait tranché elle-même la queue de ses petits avec ses dents.

13-15Une monnaie à son effigie

16Une autre particularité du manx lui confère une silhouette particulière : les pattes postérieures sont plus longues que les antérieures, ce qui lui donne l’allure : d’un lapin. Un club a été créé en 1901, et bien que la reproduction du manx soit limitée afin de contrôler les risques de consanguinité, les amateurs peuvent désormais en obtenir. Depuis les années 50 existent des manx à poils longs. ils sont apparus au Canada dans une portée, et les éleveurs ont croisé ces chats « mutants » entre eux pour que cette caractéristique devienne héréditaire. On donne à ces cousins des manx le nom de kimrique (16), qui signifie « gallois » en celtique, pour rappeler son origine. L’île de Man est si fière de son chat qu’elle a émis un premier timbre le représentant dès 1973, année de son indépendance postale, suivis d’autres en 1978 et 1989, et elle a frappé une monnaie à son effigie.

Paru dans Le Monde des Philatélistes n° 504 – Février 1996

 

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