Un timbre pour la pharmacie Autres spécialités, Thématiques

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Mis à part un timbre émis en 1953 en Algérie, la pharmacie était absente de la philatélie française… Car, si des pharmaciens ont eu leur émission, ce ne fut jamais en tant que tels, le plus célèbre d’entre eux étant sans doute le comédien Louis Jouvet.

01-02La célébration, en 1995, du demi­millénaire de la pharmacie hospitalière et l’émission le 23 septembre 1995 d’un timbre-poste commémoratif est, pour la communauté pharmaceutique , un événement puisqu’aucune émission française n’a été consacrée à cette science. A l’exception d’un timbre à l’effigie d’Eugène Millon (1812-1867), «pharmacien chimiste agronome », émis en Algérie en 1953 (1et 2).

Des hommes aux nombreux talents

03-04Un certain nombre de pharmaciens ont pourtant eu, en France, les honneurs du timbre-poste. Le premier fut Marcellin Berthelot, (3 et 4) mais, à l’évidence, c’est à l’homme politique qu’un hommage fut rendu en 1927. Zacharie Roussin, le prestigieux pharmacien chimiste des armées, fut « timbrifié » en 1951 avec ses collègues médecins du service de santé, Piqué et Villemin. Le timbre utilise pour fond le dôme de la chapelle du Val­de-Grâce, mais rien n’indique sur le timbre que Roussin soit pharmacien. Parmentier est présenté, en 1956, comme le créateur de la chimie alimentaire. Certes, mais Antoine Augustin Parmentier, apothicaire major des Invalides, a été un personnage-clé de l’histoire de la pharmacie : excellent chimiste, il fut surtout un grand organisateur des structures pharmaceutiques contemporaines, ami de Louis XVI, adulé par la Convention et honoré par l’Empereur, il inspira la «vie pharmaceutique française» pendant une quarantaine d’années et fut sans doute parmi les auteurs de la loi de germinal (1802) qui jeta les bases de l’exercice pharmaceutique moderne.

 05 Plusieurs pharmaciens non reconnus en tant que tels.«E. Millon, pharmacien»
est la seule mention de la spécialité sur un timbre de l’Union française (1953).

 Louis Nicolas Vauquelin, peu connu du public, apparaît sur un timbre en 1963 en tant que chimiste, il fut pourtant le créateur de l’enseignement moderne de la pharmacie. Figures emblématiques de la profession, Pelletier et Caventou (5) découvrirent divers principes actifs des plantes et tenaient des officines de pharmacie à Paris. Le timbre émis en 1970, qui évoque leur découverte – la quinine – en 1820, est resté silencieux sur leur identité pharmaceutique. Enfin, Henri Moissan fut honoré en 1986 avec une série des grands savants. Effectivement, Prix Nobel de chimie en 1906, grâce à sa découverte du fluor, Moissan est resté un des maîtres de la chimie française. Professeur de toxicologie à la faculté de pharmacie, il était pharmacien. Le timbre l’ignora.

06-09Le destin philatélique des pharmaciens les voua donc à être inexorablement baptisés chimistes. On pourrait ajouter à cette liste : en France, Pilâtre du Rozier (1983), et Louis Jouvet (1981) ; à l’étranger, Lucas Cranach, Ibsen, Newton et Liebig (6 à 9) également pharmaciens, qui s’illustrèrent à d’autres titres.

1011Les médecins eurent évidemment moins de difficultés à voir reconnue leur identité professionnelle. Quarante-cinq médecins ont eu droit à un timbre, dont Pierre Bretonneau (10), et Claude Bernard (11) à trois reprises (1939, 1940, 1978). Certains, comme Rabelais, ont bien sûr été honorés comme hommes de lettres et d’autres , tel Clemenceau, comme hommes politiques. Pour diverses émissions récentes, des médecins ont été «spécialisés» (pédiatre : Robert Debré ; physiologiste : Charles Richet ; bactériologiste : Alexandre Yersin ; immunologiste : Bernard Halpern ; et biologiste : Jacques Monod).

12Dans ce domaine scientifique aussi proche de la pharmacie que de la médecine qu’est la biologie, force est de constater que la philatélie a surtout érigé un piédestal à Louis Pasteur. Après Napoléon III, il fut le premier personnage his­ torique porté par la petite vignette et il bat incontestablement (en dehors de Pétain) le record des hommages postaux. Parmi les autres biologistes, on note, entre autres, Elie Metchnikoff (12), immunolo­ giste pasteurien, et Jean Rostand, le célèbre embryologiste de Ville-d’Avray.

Les professions de santé honorées

13En dehors des personnages importants de l’histoire de la santé, différentes institutions et professions de santé ont été honorées. Le service de santé militaire (1938), la Croix-Rouge (1918, 1939, 1988), la lutte contre le cancer (1941), les écoles vétérinaires (1967), les ambulancières (1966), les infirmières (1966), le don du sang (1959, 1988), le thermalisme (1988), etc. Les hôpitaux n’ont guère été à l’honneur. Les seules institutions hospitalières évoquées par la philatélie française sont l’Hôtel-Dieu de Beaune (13) (1941 et 1943), les Invalides (1946, 1974) et l’hôpital du Val-de-Grâce (1993), qui était déjà apparu sur le triptyque Picqué, Roussin, Villemin, tout comme la chapelle de la Salpêtrière, qui servit de fond au timbre Charcot.

14A la différence de la France, de très nombreux pays ont consacré des émissions à la pharmacie. Le Canada émit, en 1985, son premier timbre pharmaceutique, à l’effigie de Louis Hébert (premier apothicaire français en Amérique). L’Autriche, en 1981, dédia un timbre à la réunion du congrès de la Fédération internationale pharmaceutique ; et, la même année, l’Australie consacrait un timbre à l’enseignement de la pharmacie. L’île de la Grenade illustra un de ses timbres, en 1982, d’un dessin croqué par Norman Rockwell, représentant de façon humoristique un pharmacien au travail. Trois timbres ont été émis par Trinidad et Tobago en 1962 à l’occasion de la Conférence pharmaceutique du Commonwealth. Parmi les derniers en date, la Finlande a émis en 1989 un timbre commémoratif de la séparation de la médecine et de la pharmacie ; et l’Espagne, en 1987, un timbre à l’image d’un albarel du XVe siècle. Dans le même esprit, la Belgique a sorti, en 1994, un timbre faisant figurer trois pots de pharmacie en faïence de Delft. Parmi d’autres exemples, deux timbres importants doivent être mentionnés: l’émission, aux Etats-Unis, en 1972, du timbre Pharmacy (8 c), à l’occasion du 120e anniversaire de l’Association pharmaceutique américaine (il représente deux fioles de verre, un mortier et l’emblème professionnel de la coupe d’Hygie autour de laquelle s’enroule un serpent) (14) et le timbre de 1 DM, 750 Jahre Apothekerberuf, paru en Allemagne en 1991 pour célébrer le 750e anniversaire de la profession pharmaceutique outre-Rhin (il figure un personnage pharmaceutique médiéval tenant dans sa main une balance).

La gravure de Jacques Jubert de 1995 représente un garçon apothicaire au travail (d’après une gravure sur bois du XVe siècle), qui fait face à une vision plus moderne : la représentation d’une partie de la molécule de morphine.

Paru dans Le Monde des Philatélistes n° 499 – Septembre 1995

 

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