Hommage aux gros bras Autres spécialités, Thématiques

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Les timbres s’intéressent plus aux intellos qu’aux costauds, et pour accéder à l’immortalité philatélique mieux vaut avoir inventé le fil à couper le beurre que briller par ses pectoraux. Faisons un sort à cette injustice en rendant.

Mettons les choses au point : pour entrer dans notre thématique musclée, les prétendants ne devront pas épargner les séances de poids et haltères. Remueurs de fonte de tous acabits, vous êtes les bienvenus dès lors que votre tour de biceps se mesure en dizaines de centimètres. Bref, maigrichons s’abstenir.

01C’est bien évidemment au rayon des sportifs que nous allons dénicher nos premiers balaises. Honneur aux plus puissants, aux plus lourds, même s’ils manquent un peu (beaucoup) d’élégance : les sumotori (1), ces lutteurs dépassant fréquemment les 200 kilos, s’empiffrant à longueur de journée de poulets et autres protéines animales, considérés au Japon comme des demi-dieux. Le genre de dieu qui, s’il tombe sur la tête, doit se faire sacrément mal…

0203040506A côté de ces montagnes musculo-graisseuses, les haltérophiles parais sent presque fluets (2). Seul le soviétique Vassili Alexeiev (3), ancien bûcheron de 145 kilos soutient la comparaison. N’a-t-il pas battu 80 records du monde entre 1970 et 1977 ? Un grand champion, donc, mais pas « le plus grand athlète du monde » car ce compliment avait déjà été attribué au pentathlonien Jim Thorpe (4) par le roi de Suède lors des JO de Stockholm, en 1912. Beau gaillard que ce Thorpe, déchu de ses titres olympiques pour avoir touché au base-ball professionnel, et qui fit une brillante carrière au football américain. Deux sports made in USA qui tolèrent assez mal les demi-portions (5), à l’instar du rugby où un paquet d’avants digne de ce nom pèse rarement moins de 700 kilos (6)…

0708N’oubliez pas au passage la gymnastique masculine qui exige une sacrée poigne (7) ou des sports dits « folkloriques » comme le lancer de pierre suisse (8), en vous souvenant que « folklore » rime avec « homme fort ».

091011Malgré tout, avouons que les plus belles musculatures se rencontrent parmi les pratiquants de sports de combat, chez qui les cellules adipeuses s’effacent devant les biceps, triceps et autres quadriceps. Pas un poil de gras chez les lutteurs bretons (9) ou camerounais (10). Ce pugiliste romain (11), nul ne saura jamais combien d’adversaires il a pulvérisé dans sa carrière. Mais à la vue de ses poings à peine gantés de lanières en cuir, on tremble. Grosses châtaignes en perspective.

1213A propos : appréciez le crochet du droit qui atteint l’un des deux poids lourds de la rencontre Mohammed Ali-Georges Foreman (12).Emis juste avant le championnat du monde de 1974, le timbre s’arrange pour masquer les visages des compétiteurs afin d’éviter tout pronostic erroné ! Mettons fin au suspense : Mohammed Ali reprendra son titre. C’est encore une droite qui envoie au tapis l’américain Tony Zale (13) : à l’autre bout du gant ravageur, reconnaissez Cerdan, le « bombardier marocain ». Un vrai baraqué qui fit fondre le cœur de notre Piaf nationale.

Mangé par les loups

1415N’hésitez pas à quitter-les rings ou les salles de musculation pour traquer les costauds dans leur milieu. Remontez le temps jusqu’au chevalier Bayard (14),capable de ferrailler des heures durant, engoncé dans trente kilos d’armure. Il tint tête à une armée en défendant seul le pont du Garigliano ! Ne manquez pas le timbre sur les JO de Paris de 1924 : on y voit le surpuissant lutteur antique Milon de Crotone s’entraînant à déchiqueter des troncs d’arbre à mains nues (15). Hélas, il présuma un jour de ses forces et ne put s’extirper d’une fente où il avait glissé son bras. Les loups l’ont dévoré sur place.

16Sur la route des gros bras mythiques, vous croiserez forcément un dur de dur : Hercule. Le voilà ici confronté au géant Antée (16), redoutable bagarreur qui reprend des forces chaque fois qu’il touche terre. Hercule l’étouffera donc en le maintenant en l’air.

17 18Cherchez bien, et vous verrez que les costauds ne sont pas tout à fait les mêmes selon la culture des pays : en « douce France », pays de bon vin et de bonne chère, les timbres rendent grâce à Gargantua (17), fort en thème, fort en gueule et fort tout court. Au Canada, où la forêt est reine, on a préféré la figure du bûcheron Jos Montferrand (18) dont la force a inspiré légendes et chansons.

19Ne vous imposez qu’une seule contrainte dans cette thématique : l’exclusion des tricheurs. Pas question d’accepter ceux qui développent du muscle à coups d’injections de produits pharmaceutiques. Méfiez-vous de la « gonflette », bannissez Ben Johnson quand il aura son timbre, et même Astérix qui recourt au dopage de la potion magique. Mais tolérez Obélix (19),un cas exceptionnel: il est tombé dedans quand il était petit…

Timbroscopie n° 99 – Février 1993

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