L’art de transformer les restes (fin) Autres spécialités, Méthodologie

 

Timbres magazine n°132 de mars 2012-

Certains faussaires ont, ces dernières années, jeté leur dévolu sur les variétés. C’est un domaine que je connais fort bien et dans lequel j’interviens fréquemment en tant qu’expert. Je peux donc m’y pencher en toute connaissance de cause.

Perforation de timbres dentelés

But : obtenir un pseudo piquage « à cheval »

Procédé : physique

Exemple :

132Artde01

 

 

 

– 0,25 F Coq piqué à cheval (1). Prix de départ de ce volatile qui figurait au menu d’une importante vente sur offres en mai 2000 : 3000F (mettre à jour) . Pourquoi un tel prix, alors que les piqués « à cheval » originaux, communs, ne valent qu’une centaine de francs (mettre à jour) ? parce que c’est un ‘Coq fluo » et que c’est le premier du genre ! Ah bon… Ce timbre provient en fait d’une bande verticale normalement dentelée et qui a été reperforée horizontalement, au niveau de la valeur faciale.

 

 

132Artde02

 

 

Notre exemplaire a ensuite été détaché suivant cette ligne de perforation non originale. Quel gâchis ! Ce type de « variété » (techniquement impossible en taille-douce rotative) se rencontre souvent sur certaines valeurs des types Sabine et Liberté de Gandon : 0,01 F, 0,02 F, 0,05 F, 0,10 F, 0,20 F, 0,30 F (2). Les « grosses valeurs » sont curieusement épargnées. C’est vraiment bizarre…

 

Perforation de timbres non dentelés officiellement

But : obtenir un piquage « à cheval », un timbre dentelé tenant à un timbre non dentelé ou partiellement dentelé.

Procédé : physique

Exemples :

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Faux piquages « à cheval » des 1,60 F vert, 1,80 F rouge, 2,60 F bleu et 3,70 rose (3) au type Liberté de Gandon et de nombreux timbres commémoratifs des années 60 et 70 (4). Ils pullulent…

132Artde04

Perforation d’essais

But : obtenir un « non émis », une « erreur de couleur » ou une variété

Procédé : physique

Exemples :

Ils sont nombreux ! C’est devenu une véritable mode que de denteler les essais. Le jeu en vaut vraiment la chandelle. Jugez-en :

132Artde05

 

– 0,45 F Marianne de Béquet violet au lieu de bleu (5 et annexe I). Ce timbre, baptisé « tirage spécial violet dentelé » et coté 3,250 F (x euros) n’est à l’origine, qu’un bien modeste essai (non dentelé) réalisé pour le choix des couleurs. Sa valeur : 200 F (x euros) environ. Belle « plus value ».

légende annexe /schéma à composer

Ce cas est très fréquent. Il existe de nombreux essais de couleurs faussement dentelés et présentés comme des tirages spéciaux. J’ai même vu des « piquages à cheval » obtenus à partir de non dentelés officiels (40c Cheffer, 4f Liberté, …)

 

 

 

132Artde06

 

– 2 F Arc de Triomphe noir au lieu de brun-rouge (6). C’est un truquage ! l’original (7) est non dentelé. Notre faussaire n’a pas résisté à la tentation de transformer un vulgaire essai de couleur ou de fabrication en un rarissime « non émis ». Un essai devenu rare.

 

 

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– 3,60F Vol franco-soviétique sans les couleurs rouge et jaune (8).

Ce truquage résulte de la perforation frauduleuse d’un non dentelé incomplètement imprimé (« essai » ou « feuille de passe » ? 9).

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Nul besoin d’un expert pour juger la médiocrité du travail : la fausse dentelure est évidente, il suffit de savoir regarder ! et pourtant ce timbre figurait au menu d’une importante vente à prix net. Son prix : 10 000 euros.

 

 

 

 

132Artde10

 

 

 

– 12F + 3F Lavalette, bleu foncé au lieu de vert et sépia (10). Cette fois, ce n’est pas un essai de fabrication mais un simple essai de couleur qui a été faussement dentelé. Et voici un superbe non émis. Proposé dans une importante vente, il a certainement trouvé preneur.

Experts, expertises et querelles d’experts

Comment être certain que l’objet que l’on trouve, échange ou achète est bien authentique ? Si on n’est pas expert soi-même, il faut le faire expertiser !

Un expert est une personne qui connait un domaine à la perfection, suite à une longue pratique et qui est apte à juger, en toute impartialité. En matière philatélique, les experts professionnels sont également des négociants. Eux seuls ont, en effet, l’occasion de manipuler beaucoup de pièces et, ainsi, de bien apprendre à les connaitre. Leur compétence et leur impartialité sont, hélas, fort inégales. Comme e, médecine, les experts en philatélie se repartissent en deux catégories : les généralistes et les spécialistes. Et comme en médecine, il y a de bons experts et… de moins bons. N’importe qui peut se proclamer expert. Il n’y a malheureusement pas d’examen permettant d’écarter les trop nombreux experts d’opérette. Alors, à qui se fier ? A notre avis, il faut privilégier les experts ayant fait leurs preuves « sur le papier » (ayant publié). Ils sont généralement membres de l’AIEP (Association internationale des experts en philatélie). Il faut surtout ne pas hésiter à prendre plusieurs avis. En effet, qu’est-ce qu’une expertise ? Ce n’est rien d’autre qu’un avis, un jugement sur l’état civil d’un objet, son authenticité et son état de conservation.

Ce n’est pas parce qu’un timbre est signé X qu’il est authentique ! Cela signifie simplement que pour X il est authentique. Pas forcément pour Y. Un expert n’est pas une machine, il peut se tromper. Vous minimiserez ce risque en faisant systématiquement expertiser votre timbre ou votre lettre. Et si ces derniers sortent de l’ordinaire, n’hésitez jamais : consultez impérativement un expert spécialisé. Si vous ne le faites pas, le professionnel à qui vous proposerez un jour ou l’autre votre collection le fera. Bonjour les dégâts ?

Pascal Marziano

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